Peut-on « capturer » un homme ? Oui, mais…

Laurent Ggagbo a-t-il été arrêté, ou capturé ? Les journalistes ont  indifféremment utilisé les deux mots. Ceux de RFI ont la plupart du temps évoqué « l’arrestation » de l’ancien président ivoirien, mais ils ont aussi parlé de « capture ». Ils n’ont pas commis de faute, au regard de la langue française, mais ont, involontairement, choqué certains auditeurs et internautes.

Eliane Malin, de Montréal, a ainsi envoyé le courriel suivant à RFI :
« Bonjour,
Au nom de l'éthique journalistique et du respect dû au peuple ivoirien, dont la moitié a voté pour Laurent Gbagbo aux dernières élections, je vous invite à vous abstenir d'utiliser des termes comme "capture" en parlant de son arrestation. M. Gbagbo n'est pas un animal qu'on capture (même si son arrestation s'est déroulée de manière très peu orthodoxe), il est docteur en histoire et ex-chef d'État de la Côte d'Ivoire, pays souverain et en tout point digne de respect. Des termes aussi péjoratifs ont un vague relent de racisme, à mon sens. Vous êtes des journalistes, pas des adversaires politiques de M. Gbagbo. Je ne suis pas ivoirienne, mais j'ai beaucoup d'attachement pour la Côte d'Ivoire et son peuple. »
Le débat n’est pas nouveau. Il y a quelques années déjà, le précédent médiateur de RFI avait noté, à l’adresse des journalistes de la radio : « les auditeurs sont parfois plus sourcilleux que les dictionnaires en ce qui concerne le respect de la dignité de la personne humaine. C’est ainsi que pour certains d’entre eux, les mots « traque » et « capture » ne sont à employer que pour les bêtes sauvages ».
Que disent les dictionnaires du mot capturer ? Pour le Larousse : 1) s’emparer d’un animal à la chasse ou à la pêche. 2) Faire prisonnier un ennemi en temps de guerre, arrêter un malfaiteur en parlant de la police. 3) Se rendre maître d’un navire, d’un avion, s’en emparer, surtout en temps de guerre.
Pour le Robert : s’emparer de… Exemple : capturer un malfaiteur, capturer un animal sauvage.
Le mot capturer peut donc s’employer pour un être humain. Et il l’a été depuis des siècles. Mais il est vrai qu’il suggère que la personne capturée est, comme le disent les dictionnaires, un ennemi ou un malfaiteur, qu’il a fallu rechercher, ou aller chercher…
Or il peut y avoir divergence de points de vue, chez les auditeurs et les internautes, sur la personne « capturée ». En l’occurrence Laurent Gbagbo, que tous n’accablent pas ! Sont-ils trop sourcilleux, trop susceptibles ? Peut-être, mais ils nous rappellent avec profit, à l’instar d’Eliane, que les mots, comme les images, sont lourds de sens, d’émotion, de passion, de connotation politique, et qu’ils peuvent donc heurter.
 
 

1 Comments

Le Trésor Informatisé de la Langue Française donne pour capturer : "Arrêter une personne sur ordre de justice. Capturer un criminel dangereux".
Cela revient alors à se poser la question : existait-il un acte de justice qui aurait fondé la capture de Gbagbo ?
Il est possible que le gouvernement légal de la Côte d'Ivoire ait délivré à l'encontre de Gbagbo un mandat d'amener, ce qui n'aurait rien d'étonnant. Auquel cas l'emploi du mot est justifié.
Le reste c'est de la littérature...

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