Archives de juillet 2008

Dialogue autour de l'administration gouvernementale

                    Fidèle auditrice de RFI, Catherine Fournet-Guérin hésite, ce jour-là, entre la rubrique critiques et la rubrique félicitations. « C’est bien souvent des félicitations que je voudrais vous adresser, tant j'apprécie la rigueur de RFI, qui constitue la source d'information internationale la plus fiable à la radio. J'écris donc pour une précision linguistique qui va à l'encontre de cette rigueur : on ne dit pas "l'administration Bush", mais "le gouvernement Bush": c'est une faute de traduction qui se répand dans les médias et c'est un contre-sens. Merci d'en tenir compte !

                    Dans un premier temps, tout en ayant fait suivre l’observation à la rédaction, le médiateur lui répond:

L'Humanité communiste

                    Une auditrice de la région parisienne attire l’attention des différents rédacteurs de la revue de la presse française sur la qualification parfois donnée aux journaux cités.

                    « Je vous écris car je suis désagréablement surprise lors de mon écoute quotidienne de la revue de presse de la tranche d'informations du matin, après le journal de 7h30. Un seul quotidien est quasi systématiquement qualifié par un adjectif. Il s'agit de L'Humanité qui est présenté comme "le quotidien communiste" - ce qui est vrai - par les journalistes de la station (à part Emmanuelle Klotz, d'après ce que j'ai pu relever [mais j'écoute la revue de presse dans ma salle de bain, je ne prends pas de notes]).

Les compétences en cause

                    « A partir du  moment où l’un des principaux reproches adressés, non sans raison, à la corporation, est son arrogance, sa propension à se constituer en aristocratie autonome et supérieure habilitée à demander des comptes à tout le monde sans être contrainte d’en rendre à personne, beaucoup ont sincèrement cru que le salut viendrait du tiers-état – d’honnêtes citoyens soucieux du bien public. (…) « Mes lecteurs en savent plus que moi ». Le hic est que cette séduisante formule est fausse. Que nombre de journalistes ne sachent pas grand-chose ne permet en rien de conclure que ceux qui ne le sont pas en savent plus. Au demeurant, la conception égalitaire du savoir, le refus de toute distinction et de toute hiérarchie auxquels Internet fournit une légitimité morale et une incarnation technologique, mettent en cause la compétence spécifique du journaliste, mais aussi toutes les autres. »

                     Philippe Cohen et Elisabeth Levy, in « Notre métier a mal tourné », essai, 232 pages, éditeur Mille et une nuits

Arabes, Israéliens et Arabe israélien sur RFI

                    Auditeur de Ziguinchor (Sénégal), et internaute fidèle du site rfi.fr, M. Francis Pretat nous interpelle, ce mercredi 2 juillet, après le flash de 11h30 GMT :

                    « Vous parlez d'un "Arabe israélien" qui a été abattu par un Israélien (après une attaque avec un engin de chantier). Je viens de lire l'article sur votre site: vous écrivez un Palestinien abattu par un soldat. Pourquoi cette différence ?

                   « Je ne comprends pas comment vous pouvez utiliser ces termes d'ordre ethnique (ou culturel) concernant ces sujets particulièrement douloureux. Est-ce un choix de journalistes d'utiliser ces termes, tantôt précis ("arabe") tantôt indéfini ("israélien"). Ou alors précisez systématiquement "arabe " ou "juif" lorsque vous parlez d'Israélien, puisqu'il vous faut mentionner cette différence, mais alors je crains que vos sources ne soient suffisamment précises pour faire ainsi. Votre manière de décrire les faits de violence en Israël m'interroge régulièrement, c'est pourquoi je me décide à vous contacter cette fois-ci. »

                                        &&&

Contre soi-même

                    « Le journalisme a ses règles qui doivent prévaloir sur les intérêts. A commencer par celle-ci : se libérer de ses propres préjugés, savoir penser contre soi-même. »

                    Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération, reprenant ainsi l’expression de Charles Peguy, fréquemment utilisée aussi par Edwy Plenel, ancien directeur de la rédaction du Monde, fondateur de Mediapart

Betancourt: piété et principe de réalité

                   "Le danger de cette compassion à tous les étages, de cette débauche de piété, est qu'elle pulvérise le principe de réalité. Pas d'événements, que des reporésentations. Pas de faits: que des interprétations. (...) La pitié est ainsi devenue une drogue médiatique. On se shoote avec elle. Mais, après la stimulation que provoque la "prise", c'est le moment de la "descente", puis de la dépression. On finit par avoir un doute sur le spectacle  auquel on a soi-même participé..."

                    Joseph Macé-Scaron, dans Marianne, à propos de la libération d'Ingrid Betancourt

L'Opinion vache sacrée

                    « L’évolution sémantique est révélatrice : jadis il y avait des opinions, multiples, concurrentes, libres d’exprimer leurs différences, de confronter leurs analyses. Le passage du pluriel au singulier trahit l’accaparement du champ politique par l’idéologie libérale. L’Opinion, c ‘est la vérité et tout le reste devient erreur. « Aller contre moi, c’est aller contre l’opinion », a averti un jour Nicolas Sarkozy. On ne va pas contre l’Opinion, sauf si l’on a le goût du suicide. L’Opinion est, à la mode libérale, totalitaire. »

                    

                    Albert du Roy, journaliste, in La mort de l’information, Stock, 2007