30 oct. 2011 - 19:38
Les remarques les plus récentes portent sur les clichés pris de Kadhafi blessé, malmené, mort. « Je ne trouve pas digne la façon dont le CNT, RFI et France 24 traitent le corps de Mouammar Kadhafi… » écrit par exemple Issa, de Conakry. Il est vrai que les photos et les vidéos de la fin de Kadhafi sont violentes, insupportables. Il est vrai aussi que la déontologie journalistique veut que l’on ne montre pas d’images qui portent atteinte à la dignité humaine. Mais en l’occurrence, la diffusion de quelques unes de ces images est justifiée : il s’agit de documents historiques qui concernent la chute d’une personnalité importante. Et il s’agit de documents qui authentifient l’annonce de son arrestation puis de sa mort. Les responsables du site Internet de RFI, comme les agences de presse, se sont posé la question de l’authenticité des clichés et du bienfondé de leur diffusion. Après en avoir vérifié l’origine, ils ont conclu qu’il fallait montrer ces photos, car, comme l’a dit un des responsables de l’AFP, « l’intérêt de l’information surpasse la violence de l’image ». Il serait illégitime et malsain en revanche de multiplier la diffusion de tels clichés ou de se complaire à les présenter à tout bout de champ.
Concernant la manière dont RFI a traité le conflit, certains ont affirmé que la radio n’avait pas assez parlé des exactions commises contre les personnes noires résidant en Libye. C’est totalement inexact. Dès
le mois d’août les correspondants et envoyés spéciaux de RFI ont
rapporté les faits de violence à l’encontre de cette population, libyenne ou étrangère, et les protestations des organismes de
défense des droits de l’Homme.
Plus nombreuses ont été les accusations de partialité portées contre les journalistes. « Les journalistes de RFI, France 24 et autres sont parti-prenante dans cette guerre. Ils sont allés à l’école de la désinformation », dit un auditeur. Un autre ajoute : « je n’ai pas entendu un jour une information qui soit en faveur de Kadhafi ». Un autre encore pose la question : « est-ce que RFI est vraiment au service du gouvernement et surtout du parti du président Sarkozy » ?
Il convient d’abord d’apporter quelques précisions aux auditeurs sur la manière dont les journalistes ont « couvert » la guerre en Libye. Dans la plupart des conflits, les journalistes essayent de rendre compte des points de vue et des actes des deux camps, en se rendant dans l’un et l’autre. Ce ne fut pas possible en Libye. Au début, les journalistes ont pu se rendre à Tripoli, auprès des proches du colonel Kadhafi. Ils ont pu les voir et tenter de les interroger, même s’ils étaient en permanence sous surveillance et s’ils ne pouvaient se déplacer librement. Ensuite, tout accès à l’armée loyaliste et au front côté pro-Kadhafi a été interdit. Aucun journaliste n’a pu rendre compte de la guerre de ce côté-là. Il est évident, dans ces circonstances, qu’il est extrêmement difficile d’informer sur ce qui se dit et sur ce qui se passe dans des régions ou des villes où il est impossible de se rendre.
Les journalistes de RFI, comme ceux du monde entier, ont donc suivi la progression des insurgés, à leur côté. Etaient-ils pour autant en empathie avec eux ? Pour avoir beaucoup écouté et réécouté les reportages et les interventions des journalistes sur le terrain, je peux dire qu’ils ont su, presque toujours, garder distance et lucidité (ce qui est une belle performance dans les conditions de travail qui étaient les leurs et dans la confusion des événements). Au point qu’ils n’ont jamais nié ni les faiblesses, ni les travers, ni la désorganisation des insurgés.
Quant à savoir si RFI est aux ordres du pouvoir politique français, il m’est arrivé de déjà m’en expliquer, car l’accusation est récurrente. Oui, RFI est une radio de service public, dont le financement est public. Oui, RFI est une radio française, et il est légitime qu’elle rende compte du point de vue français (c’est même une de ses missions). Mais non, rapporter une décision politique n’est pas s’en faire le propagandiste. Et non, RFI ne reçoit pas de consignes politiques. Elle a d'ailleurs très largement diffusé le point de vue des africains (et des quelques français) qui ont condamné l’intervention de la France et de l’OTAN en Libye.
Il convient de répondre enfin à ceux qui protestent parce que leurs commentaires ne sont pas publiés sur le site internet : « la façon dont vous censurez nos commentaires et réactions ne vous honore pas, chers amis de RFI. Je suis un tout petit peu désolé de votre prise de position dans l’affaire libyenne », écrit cet internaute. Deux remarques. 1) Allez sur le site de RFI, ou allez sur la page facebook. Et lisez les commentaires, vous verrez qu’ils sont pratiquement tous hostiles à l’intervention française ! 2) Tous les commentaires écrits à la suite des articles, sur le site de RFI, ne sont effectivement pas publiés. Ce sont les responsables de RFI qui décident, comme ils en ont le droit, de diffuser ou non les remarques des internautes. Tous les autres sites d’information font ce tri, que nous appelons « modération ». Les personnes chargées de cette tâche ne sont parfois pas assez nombreuses, et il peut arriver qu’elles interrompent leur travail. Quant aux critères de choix, ils sont assez simples, comme je l’ai déjà expliqué : sont bannis, les commentaires injurieux, grossiers, calomnieux, diffamatoires, ou qui seraient passibles de poursuites judiciaires. Egalement les commentaires incompréhensibles, et plus largement ceux qui sont hors sujet ou n’apportent rien au débat. Enfin ceux qui sont redondants (il arrive que des dizaines d’internautes disent la même chose….). Internet est un espace de liberté, d’échange, de partage, de réflexion, de témoignage, d’analyse. Nous n’avons pas envie, à RFI, qu’il devienne le réceptacle de toutes les haines.
6 Comments
Continuez avec votre esprit de liberté !
Petite réponse à notre anonyme qui pense que la démocratie, ce serait la publication de tous les commentaires des internautes. Non! La démocratie, c'est le respect des personnes, c'est la tolérance, c'est l'écoute et le dialogue, c'est le combat par le bulletin de vote, et pas par les poings.
La démocratie, ce n'est pas l'incitation à la haine, à la violence, à la délation. Ce n'est pas diffamer, calomnier, rabaisser, répandre de fausses rumeurs, mentir on truquer des photos, intoxiquer ou manipuler... Toutes errances qui se rencontrent malheureusement souvent dans les commentaires des internautes.
La démocratie, c'est la liberté qui s'arrête là où sont mis à mal les droits de l'Homme. La démocratie, c'est respecter la loi, et respecter la déontologie professionnelle. Un devoir pour les journalistes et les responsables des sites Internet!
L’opinion de la médiatrice de RFI mérite un sérieux approfondissement : je pense qu’elle a raison dans sa défense du travail des journalistes d’un côté, et de la façon dont la « modération » des commentaires se fait, de l’autre. Au fond, c’est un plaidoyer qui essaye de d’expliquer et donc de justifier le fonctionnement actuel de la « maison RFI »
Elle a aussi raison de signaler que ce sont en général les défenseurs des leaders en difficulté, Gbagbo dans la cas de la cas de la Côte d’Ivoire, Kadhafi dans le cas de la Libye, qui mettent surtout en doute l’impartialité de rfi : c’est normal, ils sont très mobilisés dans la défense de leur « champion » qui est attaqué de toutes parts !
Cependant, je voudrais attirer l’attention des lecteurs-auditeurs sur le « niveau des connaissances » des journalistes de RFI… Pour une télévision ou une radio généraliste, type France 2 ou France inter, on comprend que ceux qui sont envoyés « à l’extérieur sur le terrain » ne sont pas forcément des spécialistes du pays en question. Ils rendent compte du mieux qu’ils peuvent dans le temps le plus court.
Mais en ce qui concerne RFI, radio dont l’Afrique est l’espace de travail principal, on pourrait s’attendre, quand même, à un niveau d’analyse plus détaillé donc plus explicatif. Je ne connais pas tous les pays africains, loin de là, mais il y en a que je connais très bien pour y avoir travaillé des années durant. Chaque fois j’avais fait un gros effort d’information, de contacts et de lectures, pour mieux les comprendre et mieux les apprécier ( Côte d’Ivoire, Tchad, Madagascar, Haïti ) Cependant, dans de nombreuses émissions de RFI, audio ou articles du site concernant ces pays, j’ai trop souvent constaté le petit niveau des connaissances des journalistes qui se bornent à rendre compte. Ils font rarement l’effort d’essayer d’expliquer pourquoi les événements se produisent.
Si j’écoute RFI ( de moins en moins, hélas ) et si je vais toujours sur le site, c’est parce que j’espère avoir des informations plus détaillées. Mais cet espoir est de moins en moins satisfait.
En conclusion, pour revenir aux propos de la Médiatrice, je voudrais lui dire que si les émissions et les articles étaient plus « travaillés, plus approfondis et plus fouillés » avec des retours historiques explicatifs, eh bien, je suis sûr qu’il y aurait beaucoup moins de protestataires, même en période d’événements violents, car il est beaucoup plus difficile de contester une émission ou un article complet et bien préparé.
PSB France Normandie
Tout ce qui a été dit est peut-être vrai mais pas assez convainquant, diffusez donc les commentaires dans leur intégralité c'est ça qui fait la différence et emmènera les auditeurs et autres à être fidèles à RFI. C'est ça la DEMOCRATIE.
Bonjour,
Je ne sais pas si c'est une blague, mais nier l'évidence et justifier l'évidente compromission en expliquant qu'on ne pouvait suivre les loyalistes aussi aisément que les rebelles, c'est utiliser les mêmes arguments que la presse américaine après le fiasco irakien. La presse française est au fond du trou, elle s'est compromise par une propagande qui est aussi en partie responsable des milliers de morts et de l'apathie des français dans cette affaire pour laquelle ils ont été mal informés intentionnellement. C'est un scandale qui forcément va éclabousser du monde d'ici peu.
Bien sûr vos journalistes, vos correspondants et ceux des autres presses sont toujours des professionnels qui ne commettent aucune faute et son neutre. Vous ne sortirez pas dans nos têtes ce que nous avons ressenti à savoir le parti pris pour les éléments que vous considérez comme partisans de la démocratie et on verra bien la suite des événements en Libye. La démocratie et la liberté dans les pays arabes comme africains n'intéressent pas vos dirigeants qui agissent de façon opportuniste. Rappelez-vous comment Ben Ali était flatté par les dirigeants français,Chirac, Aliot Marie pour ne citer que ceux-là, les Bongo, les Eyadéma , les Sassou N'guesso ne sont jamais traités de dictateurs mais à leur mort certainement RFI va leur affecter ce cliché et souhaitera la bienvenue au nouveau roitelet qui préservera les intérêts français contrairement à Mouammar Kadhafi qui est UN HEROS !!!!!
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