Un internaute ivoirien réagit à un article du site Rfi sur le dialogue que le premier ministre de son pays entend mener avec l’opposition et il nous écrit ceci : « C'est ridicule tout cela. Dialoguer avec des gens meurtris dans leur chair, emprisonnés, traqués, exilés et privés de leurs avoirs? Si RFI était impartiale, je crois qu'elle dénoncerait les faits réels et ça irait mieux au pays ». Un autre proteste : « J'aimerai savoir pourquoi la France tourne autour de la situation sécuritaire au nord mali? Parce qu’elle n'a pas d’intérêt économique chez nous? Est ce que ce n'est pas la France même qui soutient les rebelles? Pourquoi les laisser s’exprimer à Rfi et France 24 sachant que c'est des bandits?» Enfin, un troisième se désole : « Le site de la RFI doit aussi publier des infos quand le gouvernement angolais fait quelque chose de bien pour sa population. Mais sur ce site on ne voit que des manifestations ou on parle de la misère en Angola ou en Afrique. »
A priori, peu de rapport entre ces trois reproches. Et pourtant, ils sont tous les trois à relier à la notion de neutralité du journaliste.
La neutralité, ou impartialité, voilà un objectif auquel chaque journaliste doit tendre. Son rôle est de recueillir, vérifier, mettre en forme et diffuser l’information auprès des lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs. Jusque là, tout va bien sauf que la nature même de l’information peut dévoyer ce bel enchaînement. En effet, une frontière assez nette sépare les données dont ont peu être certains (manifestation, attaque, victimes) de celles qui relèvent des impressions, ou des opinions. Ainsi le premier internaute cité ne croit pas à la réalité de la main tendue d’A. Ouattara à son opposition, le second internaute considère les interviewés de Rfi ou F24 comme des « bandits », le troisième pense que les bons sujets ne sont pas traités. Face à la réalité des données, la vérité en quelque sorte, surgit l’opinion certes respectables, mais néanmoins contestable. Et finalement, l’action du journaliste, qui consiste à apporter une information, un « savoir » réel et vérifié, se retourne contre lui dès lors que cette information ne va pas dans le sens de ce que pense l’auditeur, le lecteur ou le téléspectateur. Sa « foi » en quelque sorte.
Reste que le journaliste ne peut pas prétendre à l’impartialité absolue : il a lui aussi des opinions en tant qu’individu, et le simple fait de choisir tel sujet plutôt que tel autre est déjà ne plus être tout à fait neutre. Pour contrebalancer cela, dans l’exercice de ses choix, il doit faire preuve de la plus grande honnêteté et ne pas oublier de présenter tous les points de vue, même (et surtout) ceux avec lesquels il n’est pas d’accord. Ainsi seulement il aura droit à ce jugement rare d’une internaute africaine à propos d’un article du site Rfi sur la nouvelle procureure du tribunal CPI : « Je suis surpris par l'incroyable impartialité de cet article. C'est vraiment rare de lire un tel article dans un organe de presse occidental. Voila une journaliste respectable et respectueuse. »
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